Publié le 20.04.2021
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Avis
Matières
AV21-15-Projet de loi n° 7473 relatif au patrimoine culturel (avis complémentaire)
Eléments-clés de l’avis complémentaire
Les remarques principales du SYVICOL se résument comme suit :
Patrimoine archéologique
- Le SYVICOL défend l’idée d’une approche plus pragmatique du concept de l’archéologie préventive, basée d’une part sur une redéfinition des niveaux de potentialité archéologique et d’autre part sur une simplification de la demande d’évaluation et d’autorisation ministérielle, et ce afin d’assurer un meilleur équilibre entre protection du patrimoine et gestion urbanistique. Il constate que nos voisins signataires de la Convention de la Valette ont opté pour une application plus ciblée de la notion d’archéologie préventive sur leur territoire, sans pour autant trahir leurs engagements.
- Il est d’avis qu’un traitement minutieux et extensif des données scientifiques existantes doit permettre de circonscrire avec davantage de précision des zones sensibles du point de vue archéologique, plutôt que de transférer cette charge sur les promoteurs publics et privés et plus généralement sur les citoyens. L’insécurité de planification dans laquelle se retrouveront de nombreux projets de construction aura une incidence non négligeable sur les délais d’exécution et, par voie de conséquence, sur la mise à disposition de logements sur le marché. Si, actuellement, moins de la moitié des projets d’aménagement reçus par le CNRA font l’objet de sondages, il est à craindre que ce chiffre n’augmente massivement avec l’entrée en vigueur du projet de loi.
- A l’article 2, la nouvelle définition de la ZOA laisse ouverte la question de son articulation par rapport à la sous-zone de la ZOA, qui est la zone majoritaire. De l’avis du SYVICOL, celle-ci devrait être la catégorie d’ensemble correspondant à une ‘sensibilité archéologique’, tandis que la ZOA recouvrirait les niveaux ‘très haute sensibilité archéologique’ et ‘haute sensibilité archéologique’. Les zones à ‘faible potentialité archéologique’ seraient d’office exclues du champ d’application du projet de loi.
- Tant la partie graphique de l’inventaire du patrimoine archéologique, que la carte de la ZOA, doivent être mises à la disposition du public afin de restituer à tous sans restriction les connaissances acquises en matière d'archéologie. Le propriétaire d’une parcelle devrait également pouvoir solliciter un extrait de cette carte renseignant la sensibilité archéologique du bien, le cas échéant pour anticiper d’éventuelles prescriptions d'archéologie préventive et examiner l’opportunité de demander une telle opération.
- En ce qui concerne les travaux soumis à une demande d’évaluation (article 4), le SYVICOL est d’avis qu’un remblai ne devrait pas rentrer dans le champ d’application du projet de loi, dans la mesure où il n’altère pas la surface du terrain et encore moins le sous-sol. Il se félicite que les travaux d’infrastructure urgents dans la ZOA et les travaux d’assainissement de la voirie existante dans la sous-zone de la ZOA aient été ajoutés à la liste des travaux dispensés d’une demande d’évaluation et demande à voir préciser que ces dispenses se cumulent. Néanmoins, il reste préoccupé par le principe posé par le texte selon lequel tous les travaux soumis à autorisation, quelle que soit leur envergure, sont soumis à une demande d’évaluation, sauf ceux dispensés expressément. Or, les communes sont donc doublement impactées par le projet de loi qui s’applique à tous les travaux effectués dans la ‘zone verte’.
- A l’article 5, le SYVICOL demande à voir préciser le contenu du dossier de demande d’évaluation ainsi que les modalités et délais de la procédure à suivre par le ministre en cas de demande incomplète, le cas échéant par règlement grand-ducal. Il souhaite également que les communes, en tant qu’autorités de délivrance de l’autorisation de construire, soient informées de la prescription ministérielle.
- L’article 6 a subi de nombreuses modifications, notamment par l’ajout de deux nouveaux paragraphes prévoyant l’hypothèse d’une découverte exceptionnelle, pour laquelle la durée de réalisation de l’opération des fouilles archéologiques peut être prolongée jusqu’à un maximum de 5 ans. Or, le SYVICOL est d’avis que les quatre critères permettant de qualifier la découverte d’exceptionnelle sont trop évasifs et il demande qu’ils soient davantage caractérisés. D’autre part, il semble particulièrement injuste de laisser à la charge du maître d’ouvrage la moitié des frais liés à des fouilles archéologiques en cas de découverte exceptionnelle. L’intérêt de la découverte justifie à lui seul que l’Etat prenne à sa charge l’intégralité des frais liés à ces fouilles, qui sont effectuées pour le compte de la communauté à des fins de préservation.
- La durée d’une opération d’archéologie préventive a été fixée en principe à six mois maximums, et le SYVICOL est d’avis que ce délai est adapté au vu de la pratique et de la taille moyenne d’un PAP. En effet, il faut un à deux jours pour sonder un hectare de terrain et, si le sondage est positif – ce qui représente environ 2% des cas – on peut fouiller quelque 80 hectares en six mois. Le SYVICOL demande partant à voir rétablir la limite de douze mois qui présente une garantie pour le maître d’ouvrage. Enfin, il souhaite voir préciser les relations contractuelles ou conventionnelles entre l’opérateur archéologique, le maître d’ouvrage et l’INRA, qui doit assurer le contrôle technique et scientifique de l’opération. Un contrat-type par opération – diagnostic ou fouille – pourrait ainsi être élaboré et mis à la disposition des maîtres d’ouvrage.
- Le SYVICOL salue la précision apportée par l’amendement 7 à l’article 7 du projet de loi, selon lequel une opération de diagnostic archéologique peut être demandée par une commune sur les terrains dont elle est propriétaire, sans que les autorités communales ne disposent d’un projet de travaux précis. Le texte devrait néanmoins être complété dans le sens où en cas de résultat négatif, un certificat attestant de la levée des contraintes archéologiques est délivré au propriétaire avec signalisation correspondante sur la carte archéologique.
- Alors même qu’une opération d’archéologie préventive est prescrite par le ministre, qu’elle doit être effectuée par un opérateur archéologique agréé, sous le contrôle technique et scientifique de l’INRA et selon un cahier des charges établi par le ministre, l’article 11 du projet de loi impose de demander une autorisation ministérielle préalable, dont les conditions de demande et d’octroi doivent être fixées par un règlement grand-ducal. Cette lourdeur administrative difficilement justifiable au vu des garanties posées par le projet loi fera perdre inutilement un temps précieux au maître d’ouvrage. En effet, ce n’est pas tant la durée de réalisation des opérations d’archéologie préventive qui est problématique mais le temps perdu avant, entre la demande d’évaluation et le début des opérations, ce d’autant plus que le maître d’ouvrage est tributaire de la disponibilité de l’opérateur archéologique agréé.
- Le SYVICOL plaide dès lors pour un allègement procédural respectueux des objectifs archéologiques et de la simplification administrative. Il préconise de fusionner la demande d’autorisation ministérielle avec la demande d’évaluation et de fixer dans cette décision ministérielle les conditions d’exécution des opérations d’archéologie préventive. Plus vite la mesure et les conditions seront connues, plus vite le maître d’ouvrage pourra se mettre à la recherche d’un opérateur archéologique agréé et élaborer avec lui un plan d’intervention. En ce qui concerne les fouilles archéologiques préventives, des conditions plus strictes pourraient s’imposer du fait de la sensibilité de ces opérations par rapport à un simple diagnostic. On pourrait ainsi imaginer que le contrat conclu entre l’aménageur et l’opérateur archéologique agréé doit préciser, entre autres, le projet scientifique d’intervention et que ce contrat est transmis pour approbation au ministre, ce qui vaudrait demande d’autorisation.
- L’amendement apporté à l’article 16 concernant les découvertes fortuites laisse planer le doute quant aux intentions des auteurs et le SYVICOL propose d’exclure expressément les travaux exécutés dans le cadre d’une opération d’archéologie préventive ou programmée de son champ d’application. Il suggère également de le compléter par des précisions relatives à l’arrêt immédiat des travaux et à l’intervention des agents de l’INRA, afin de renforcer la sécurité juridique pour les personnes concernées.
- La procédure de classement d’éléments du patrimoine archéologique (article 19) et d’un bien culturel mobilier (article 45) comme patrimoine culturel national devrait être revue pour raccourcir le délai d’instruction, réduire le nombre de personnes pouvant introduire une telle demande, garantir le droit à l’information des propriétaires concernés dès le début de la procédure et leur implication dans le processus décisionnel ainsi que leur droit à un recours effectif, et permettre la prise en compte des observations émises par les communes.
Patrimoine architectural
- La protection du patrimoine architectural par les communes a pris de l’ampleur dans le cadre de la refonte des plans d’aménagement généraux (ci-après PAG), par le biais des secteurs et éléments protégés d’intérêt communal de type « environnement construit », qui soumettent les immeubles à des servitudes spéciales de sauvegarde et de protection. Une partie conséquente des territoires des communes et la très grande majorité des centres historiques urbains sont donc d’ores et déjà couverts – ou seront couverts - par des servitudes qui affectent directement les droits des propriétaires concernés. La définition particulièrement large du nouveau secteur protégé d’intérêt national fait craindre au SYVICOL la désignation de nombreux secteurs, entraînant une superposition des compétences et une multiplication des contraintes par ailleurs difficiles à faire accepter.
- Le SYVICOL plaide partant pour que la création de secteurs protégés d’intérêt national soit davantage encadrée et qu’elle soit réservée au voisinage des immeubles qui présentent un caractère hautement remarquable et symbolique. Ces secteurs ne devraient pas en principe se superposer à un secteur protégé d’intérêt communal mais si tel était le cas, il faudra veiller à la cohérence des servitudes et charges imposées par les deux protections.
- Les efforts des communes ne doivent pas être remis en cause par la désignation de secteurs protégés d’intérêt national. Pour ces raisons, le SYVICOL réitère sa demande à être saisi et consulté par rapport à l’avant-projet de règlement grand-ducal parallèlement à la commission pour le patrimoine culture. Il est convaincu qu’il serait utile pour les autorités étatiques de disposer de l’avis des communes concernées ce qui permettra de rassembler les éléments permettant d’apprécier les finalités et l’opportunité du projet avant le lancement de la procédure d’enquête publique, qui arrive en général trop tardivement pour prétendre à elle seule répondre à l’exigence d’une implication des autorités communales dans le processus décisionnel.
- Le SYVICOL constate en outre que la procédure de classement des immeubles et de création des secteurs protégés d’intérêt national prévue par le projet de loi ne présente pas de garanties équivalentes à celles prévues sous l’empire de la loi antérieure, alors même que l’avant-projet de règlement grand-ducal affecte de manière individuelle les droits des personnes concernées, et ce dès sa publication conformément à l’article 28 du projet de loi.
- Si les articles 34 à 36 du projet de loi précisent désormais les conditions de l’allocation d’une subvention pour travaux pour les immeubles faisant l’objet d’une mesure de protection nationale ou communale, le SYVICOL demande à voir ajouter aux travaux éligibles de conservation et de restauration de l’aspect original de l’immeuble, les travaux ayant pour objet la mise en valeur du bien immobilier ainsi que les travaux de transformation ou de rénovation de l’immeuble. Il est également d’avis qu’un mécanisme de préfinancement de ces travaux ou de paiement d’avances pourrait être introduit afin de faciliter les démarches des propriétaires et surtout de les encourager à préserver et à maintenir leur bien dans un bon état de conservation.
Patrimoine mobilier
- Le nouvel article 44 paragraphe 2 énumère une liste de dix-neuf biens culturels susceptibles d’être classés comme patrimoine culturel national, et les articles subséquents leur attache de nombreux effets, même en l’absence de classement. Le SYVICOL recommande de définir des critères remplissant les conditions de valeur et d’ancienneté définies à l’Annexe I.
- La commission de la culture a fait droit à la demande du SYVICOL que les communes soient ajoutées à la liste des personnes pouvant demander une protection d’un bien meuble culturel ainsi que de celles pouvant la procédure de déclassement, ce que le SYVICOL salue.
Patrimoine immatériel
- Le texte de l’article 104 concernant l’inventaire du patrimoine immatériel a été largement remanié par les amendements. Si, auparavant, il était possible d’envisager qu’une commune participe à la réalisation de l’inventaire national du patrimoine immatériel ou puisse faire une demande d’inscription, la nouvelle définition est beaucoup plus limitative et elle exclut a priori les personnes morales de droit public des personnes pouvant introduire une telle demande. A ces conditions viennent s’ajouter de nombreuses caractéristiques que l’élément doit remplir pour pouvoir être inscrit sur cette liste. S’il est évident que des critères doivent être définis, le SYVICOL est d’avis que ceux-ci ne devraient cependant pas être trop restrictifs.
- Actuellement, un expert est chargé de cette mission d’inventaire et le SYVICOL ne voit aucune raison de ne pas continuer dans cette voie, en donnant la possibilité à la société civile dans son ensemble, les citoyens, les communes, les associations, les groupes folkloriques, etc d’y contribuer. La demande d’inscription de l’élément sur l’inventaire national du patrimoine immatériel devrait donc avoir comme seule condition celle de motiver sa demande, l’arbitrage et la décision finale revenant au ministre sur base de critères préalablement définis et connus, inscrits dans la loi ou dans un règlement grand-ducal. Ce serait au ministre de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, par exemple en établissant un plan de sauvegarde.
- Compte-tenu de l’importance que revêt à ses yeux la nécessité de faire partie de la future commission pour le patrimoine culturel, le SYVICOL réitère ici sa demande de pouvoir désigner au moins un représentant au sein de cette commission créée à l’article 109 du projet de loi.
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Publié le 20.04.2021