D’un lieu de culte à un lieu de culture

L'église Sainte-Barbe à Lasauvage fut la première église du pays à être désacralisée à la suite de la séparation entre l’Église et l’État en 2019 et à être réaffectée en même temps. Dans ce contexte, le bâtiment, classé monument national en 2017, a fait l'objet d'une rénovation importante.

À l’époque, les discussions avec l'archevêché au sujet de l'usage futur de l’église Sainte-Barbe à Lasauvage se révélaient longues et difficiles étant donné que la dignité des lieux, comme prévu par l’article 15 de la loi du 13 février 2018 portant sur la gestion des édifices religieux et autres biens relevant du culte catholique, ainsi que sur l’interdiction du financement des cultes par les communes, a dû être respectée. En outre, les responsables politiques de la Ville de Differdange n'étaient pas vraiment demandeurs de la désacralisation étant donné qu’il y avait une série de réticences en raison de l'héritage historique et touristique de Lasauvage, caractérisé par ses rangées de maisons de mineurs et cet emblème par excellence de style néogothique, considérée comme une des plus belles églises au Grand-Duché.

Au niveau des conditions de propriété la situation a en revanche rapidement été clarifiée. Avec le décès du comte Fernand de Saintignon en 1921, qui avait à l’époque demandé l’autorisation de bâtir, mis à disposition le terrain et pris en charge les frais de construction, l’église Sainte-Barbe a été léguée à la commune.

Après qu’une solution « hybride » de réaffectation envisagée à un certain moment d’une utilité tant ecclésiastique que séculière n’a pas abouti, les responsables politiques ont décidé finalement à ce que l’église serait utilisée dans le futur comme lieu de concerts, d’expositions et de lectures publiques ou même pour des soirées privées à haut niveau, le tout sous la régie du service culturel de la Ville de Differdange.

L’année passée, toute une série d'événements ont en effet été organisés dans le cadre d’Esch2022. Il convient de mentionner dans ce contexte entre autres la Melting Session 1o, une installation audiovisuelle immersive avec une projection en vidéo-mapping sur le plafond et le choeur de l’église imaginée par l’artiste Paul Schumacher et la soirée Hidden Session, un évènement musical accompagné d’un show de lumière mettant en valeur ce lieu atypique et emblématique. Des soirées de méditation sont aussi régulièrement organisées ou des expositions comme No Church in the Wild qui aura lieu fin octobre et qui porte sur ce lieu si divin et en même temps sauvage dans une vallée enchantée.

À partir de 2020, les travaux de rénovation de l’édifice du culte, dont la consécration remonte à 1894, ont finalement pu commencer et les choses se sont concrétisées. Dès le début, l’objectif de la rénovation était de conserver un maximum d’éléments d’origine, tout en intégrant les technologies aujourd’hui nécessaires à une salle multifonctionnelle ouverte à tous, ce qui représentait un véritable défi, en particulier dans les domaines de l'acoustique, du chauffage, de l'éclairage et de la sécurité.

Dans une première phase, la façade de l’église a fait l’objet d’un nettoyage et d’une réfection de ses éléments en pierre de taille. Quelques éléments (la conduite de la cheminée accolée dans les années 50 et l’extension de la sacristie pour citer ces deux exemples) ont été démolis pour remettre l’église dans son état d’origine. Au niveau du toit, il a été procédé à une isolation et une sécurisation des lieux, grâce à l’installation d’une passerelle. Des mesures ont également été entreprises pour faire retentir correctement les cloches tout en évitant le transfert des vibrations à la maçonnerie de la tour. L’installation d’un nouveau système de chauffage du sol tout comme l’isolation du sol et des voûtes ont été très importants en matière thermique. S’y ajoute une nouvelle installation électrique avec un nouveau câblage.

La reconversion d’un lieu de culte en lieu public entraîne pourtant toujours des contraintes comme le montre l’exemple de la porte principale qui, pour garantir un maximum de sécurité, doit en règle générale s’ouvrir vers l’extérieur. « Pour des raisons statiques et esthétiques, cela n'était pas réalisable, voilà pourquoi nous avons dû demander une dérogation auprès des instances compétentes, car la priorité absolue était de garder les portes originales », commente Manuel Lopes. L’accès aux personnes à mobilité réduite, a aussi été assuré par deux rampes amovibles et un réaménagement des abords.

Touchant quasiment tout le bâtiment, en passant de la toiture aux fenêtres jusqu’à la dalle du sol, la rénovation a été réalisée de façon à ce que l’ancien lieu de culte, dont la capacité est de 194 personnes au maximum, respecte les prescriptions du Service national de la sécurité dans la Fonction publique (SNSFP) en matière d’accessibilité et de sécurité des personnes (désenfumage, sortie de secours, …).

« Cette mission a été compliquée, sans oublier les contraintes liées au classement comme monument national et des adaptations permanentes qui ont dû être faites dans le cadre de la rénovation. Nous n’étions pas à l'abri de surprises, ce qui a pesé sur le budget » résume Manuel Lopes, architecte de la Ville de Differdange.

Quelques communes intéressées par le projet se sont d’ailleurs déjà rendues sur place pour se faire une idée de la rénovation qui a duré presque deux ans et dont les coûts totaux s'élèvent à 2 150 000 euros, avec une partie considérable subventionnée par l’État.